Bien que la science cherche à démontrer au mieux des vérités générales, la nature est souvent bien plus inventive. Ainsi, même au niveau forestier, nous ne sommes jamais au bout de nos surprises, tant il existe de cas particuliers.
Des apparences trompeuses
Même si le fait d’être creux peut être très péjoratif chez les êtres humains, le sens est tout autre pour les arbres, qui ne souffrent pas forcément de ce problème.
Un arbre creux est une tige dont le bois, à l’intérieur du tronc, s’est plus ou moins dégradé. Cette altération peut être due à un champignon lignivore1, à une pourriture quelconque... En revanche, contrairement aux idées reçues, un arbre creux n’est pas nécessairement mort, ni souffrant.
En effet, les parties vitales, étant situées à la périphérie du fût, restent intactes : l’écorce renferme plusieurs tissus nécessaires à la vie de l’arbre, dont le liber, qui achemine la sève élaborée2. Cette même écorce protège l’aubier, mince couche de bois qui assure le transport de la sève brute3.
A contrario, le bois qui est dégradé, c’est le duramen4 (ou bois de cœur), qui n’est plus fonctionnel. Sa seule fonction, indirecte, est d’assurer la stabilité de la tige face au vent. Le bois qui le compose est donc « mort », dans le sens où les vaisseaux et autres tissus n’assurent plus leurs fonctions.
Cela signifie qu’un arbre vit uniquement grâce à son pourtour. Des dégâts causés à l’écorce sont donc beaucoup plus dangereux, et source de mortalité chez ces individus.
Au niveau des plantes, quelques remarques sont également à souligner. Prenons-en une qui s’appelle le fragon Ruscus aculeatus.
Fragon
(Photo : Thibaud SURINI)
On le trouve couramment en France, et ses feuilles ovales sont même très piquantes. Feuilles ? Ou devrais-je plutôt dire rameaux.
En effet, contrairement à ce qu’on pourrait penser, ce sont des rameaux qui sont aplatis, et non pas des feuilles. Ces rameaux particuliers sont alors appelés Cladodes5.
Enfin, bien que la forêt nous apporte de nombreux aliments, rappelons que tout n’est pas comestible. Un des meilleurs exemples est celui de l’If Taxus baccata. Il produit des petites boules rouges, que l’on appelle des arilles, dont la couleur est plutôt attirante.
Aiguilles d’If
(Photo :Thibaud SURINI)
Cependant, bien que cette gaine charnue rouge soit comestible, les graines qu’elle contient sont toxiques. L’ingestion de quelques graines peut provoquer la mort par empoisonnement.
De même, on considère que toutes les parties de l’If sont vénéneuses, excepté cette enveloppe rouge. Ainsi, éviter de laisser des enfants seuls à portée de ces conifères, car la vue de ces arilles pourrait leur ouvrir l’appétit, et conduire à un drame.
Le fruit de nos recherches
S’il y a bien un organe que nous connaissons tous, (ou que nous pensons connaître), il s’agit du fruit. Mais, là encore, il y a de nombreuses vérités qui sont peu connues.
De quoi s’agit-il ?
Les fruits ne doivent pas être limités à ceux que l’on trouve dans notre assiette. En effet, cet organe, spécifique aux plantes à fleurs, résulte du développement de l’ovaire après fécondation. Ainsi, lorsque la graine se forme, le fruit se développe pour protéger cette dernière.
C’est donc un organe qui protège un nouvel individu nouvellement formé. Ce fruit est spécifique aux Angiospermes6, car on ne les trouve pas chez les résineux (gymnospermes7), où la graine, contenue dans les cônes, est nue.
Avec cette définition, on remarque que les châtaignes, glands, tomates, grains de blé... sont des fruits. Cependant, nous verrons par la suite que certains aliments que l’on appelle fruit n’en sont pas.
De quoi se compose-t-il ?
Un fruit, qu’il soit sec, ou succulent8, a toujours la même composition. Trois parties distinctes existent : l’épicarpe, le mésocarpe et l’endocarpe. Si on considère la cerise, l’épicarpe, c’est sa peau ; le mésocarpe, c’est la partie charnue que l’on déguste volontiers ; l’endocarpe, c’est le noyau, dans lequel se trouve la graine.
Des fruits mal connus
Les paragraphes qui suivent parlent de quelques particularités. Cependant, il en existe bien d’autres, qu’il serait trop long de lister.
L’avocat est un fruit de la catégorie des baies9. Il se compose d’une peau, d’une partie charnue et de ce qu’on appelle généralement un noyau. Tout ressemble donc à la composition normale d’un fruit, décrite ci-dessus.
Cependant, le « noyau » n’est en aucun cas un endocarpe protégeant une graine. Il s’agit de la graine elle-même. Ainsi, tout le fruit l’entourant est charnu, ce qui correspond bien à la définition d’une baie. Il ne faut donc pas parler d’un noyau d’avocat, mais bien de sa graine.
La noix, quant à elle, est une drupe, c’est-à-dire, un fruit à endocarpe lignifié. Cette partie, c’est ce qu’on a l’habitude de casser, pour manger la graine à l’intérieur. Cependant, il existe également une partie charnue qui recouvre naturellement la noix.
Il s’agit du brou de noix : c’est la partie vert clair, qui se dessèche naturellement pour laisser apparaître l’endocarpe que l’on connaît. Ce brou, bien que charnu, est très amer et non comestible.
Parlons à présent de la Framboise. Sa particularité est que lorsqu’on en mange une, on mange plusieurs fruits. En fait, chaque petite alvéole qui la compose est un fruit, contenant une graine dure, que l’on sent facilement sous la dent.
Ainsi, tous ces fruits charnus sont soudés pour constituer la framboise que l’on connaît. On parle alors de polydrupe (ensemble de petites drupes, soudées entre elles). La mûre fait également partie de cette catégorie.
Il existe également des faux fruits, soit des éléments que l’on appelle fruit à tort.
C’est le cas de la fraise, qui bien que charnue, n’est pas elle-même le fruit de la plante. Il s’agit en fait du réceptacle10 de la fleur qui s’est hypertrophié pour devenir succulent et coloré. L’intérêt est d’attirer les animaux qui sont des agents disséminateurs des fruits. Ces fruits... quels sont-ils ? Il s’agit des petits grains jaunes situés sur la fraise.
Chacun d’entre eux est un akène11, soit un fruit à part entière. Chacun contient une graine et donc un nouvel individu. La fraise est donc un support pour tous ces fruits, alors qu’elle est une partie de la fleur du fraisier.
On retrouve cette particularité pour la Pomme, la Poire, ou encore le cynorrhodon, le faux fruit de l’églantier (plus connu sous le nom de rosier).
Enfin, certains fruits se développent sans qu’il y ait eu fécondation. Autrement dit, certains fruits ne contiennent pas de graine fécondée. On qualifie ces fruits de parténocarpiques. C’est le cas de la banane.
Conclusion
Les premières impressions que l’on peut avoir sont donc faussées par la réalité des choses. La science a apporté des conclusions souvent surprenantes, qu’il est toujours utile et intéressant de connaître. Mais, soyons certains que la botanique nous réserve encore des surprises qu’il est parfois difficile d’imaginer.
Thibaud SURINI
Liens :
http://www.www.botanique.org/
http://www.ese.u-psud.fr/flore/sommaire.html
http://www.snv.jussieu.fr/bmedia/Fruits/liste.htm
Lexique :
1 : Qui « mange » le bois et est donc à l’origine de sa dégradation.
2 : Sève synthétisée par les feuilles, et qui descend pour être diffusée dans les différents organes de l’arbre.
3 : Sève qui monte des racines jusqu’aux feuilles.
4 : Bois de cœur non vivant différencié, à coloration plus foncée que celle de l’aubier.
5 : Rameau aplati ressemblant à une feuille.
6 : Plante à ovules et graines renfermés dans un ovaire.
7 : Plante à fleurs, dont les ovules et graines nues ne sont pas contenues dans un ovaire.
8 : Se dit d’une plante ou d’un organe charnu gorgé d’eau.
9 : Fruit charnu, succulent, à endocarpe non lignifié, renfermant ordinairement plusieurs graines.
10 : Extrémité dilatée d’un pédoncule floral, portant les pièces d’une fleur.
11 : Fruit sec ne s’ouvrant pas à maturité contenant une seule graine. (Ex : Gland du chêne)
Thibaud Surini
|